L’expression « troubles psychiatriques » englobe de nombreux problèmes cognitifs, affectifs et comportementaux. La détermination de l’aptitude à conduire des personnes atteintes d’un trouble psychiatrique est souvent complexe. Il y a énormément de variations individuelles entre les personnes atteintes d’un trouble psychiatrique, particulièrement quant au jugement et à l’autocritique, et de multiples problèmes coexistent souvent. Beaucoup de troubles psychiatriques sont chroniques et peuvent entraîner des rechutes, donc une surveillance continue s’impose.
Les effets indésirables d’un traitement ou d’un médicament peuvent présenter un danger pour l’aptitude à conduire (voir la section 6, Médicaments et drogues illicites). Les personnes atteintes d’un ou plusieurs troubles psychiatriques peuvent toutefois être plus sécuritaires au volant si elles prennent des psychotropes que si elles n’en prennent pas.
Même si le milieu de la recherche sur l’aptitude à la conduite a insisté sur les principaux troubles psychiatriques cliniques, les médecins doivent également tenir compte des troubles de consommation d’alcool et d’autres drogues (Section 5, Alcool, et Section 6, Médicaments et drogues illicites), et des troubles de la personnalité, de même que des effets des stresseurs psychosociaux et de la capacité fonctionnelle de la patientèle lors de l’évaluation de l’aptitude à conduire de personnes aux prises avec un trouble psychiatrique. Des facteurs comme le manque de sommeil, la fatigue, le stress ou une forte anxiété peuvent aggraver des problèmes existants. La pandémie de COVID-19 a grandement fait augmenter la prévalence de tels facteurs et le risque d’accident de voiture (Vingilis et coll., 2020, 2021).
Toute réduction importante de la capacité fonctionnelle, surtout de nature cognitive, doit éveiller les soupçons chez les médecins et justifier des examens plus approfondis. Notamment, le syndrome post-COVID-19 (aussi connu sous le nom de « COVID-19 de longue durée », ou « COVID de longue durée ») pourrait être une complication pour 10% à 30% des personnes ayant contracté le SRAS-CoV-2 (Vanichkachorn et coll., 2021).
Dans certains cas, le suicide a été attribué à la révocation du permis de conduire, surtout chez des hommes âgés (Ko et coll., 2021). Ce risque met en évidence l’utilité de programmes sociaux et éducatifs qui aident les personnes à faire face à une transition inattendue découlant de la perte du permis de conduire pour des raisons médicales.
Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (5e édition, connue sous le nom de DSM-5; American Psychiatric Association, 2013) et sa dernière révision (DSM-5 – Texte révisé, connu sous le nom de DSM-5-TR, https://psychiatry.org/Psychiatrists/Practice/DSM/Frequently-Asked-Questions#4111; American Psychiatric Association, 2022) ont fait l’objet de nombreuses critiques, mais ils demeurent ce qu’il y a de mieux pour progresser vers un système de diagnostic basé sur des signes représentant la dysfonction du système nerveux central plutôt qu’axé sur des symptômes.
Chaque édition du DSM est beaucoup plus longue que la précédente. Les médecins occupés qui cherchent une référence pratique, bien écrite et succincte au DSM-5-TR pourront envisager de consulter The Pocket Guide to the DSM-5 Diagnostic Exam (Nussbaum, 2022).
Dans une revue systématique internationale complète, Rapoport et coll. (2021) ont tiré les conclusions suivantes :
Les données probantes disponibles sont limitées par leur nombre, leur modèle d’étude hétérogène et leur faible qualité. Toutefois, on constate une augmentation du risque, qui justifie la présence de lignes directrices faisant la promotion de périodes sans conduire (dans les cas de symptômes aigus et pendant l’ajustement au traitement), des restrictions au permis de conduire et des exigences pour des évaluations médicales régulières pour les personnes atteintes de troubles psychiatriques persistants. Avec les preuves actuelles, il est difficile de cerner l’ampleur de ce risque accru, que ce soit de manière générale ou propre à un diagnostic; ces données ne proposent donc pas de restrictions générales. Les caractéristiques des personnes atteintes de troubles psychiatriques les plus à risque d’accident de la route restent encore à déterminer. Cependant, comme pour tous les troubles qui pourraient influencer la cognition, le jugement et l’autocritique, l’approche au cas par cas recommandée par les lignes directrices internationales devrait être maintenue.
À l’avenir, la recherche devrait comprendre des évaluations objectives des troubles psychiatriques et du risque d’accident de la route lors de la mesure de l’exposition comme variable de confusion, l’identification des facteurs de risque d’accident pour les personnes ayant des troubles psychiatriques, la délimitation du rôle du traitement et les considérations concernant les effets des troubles psychiatriques persistants et leurs traitements sur la performance de conduite sur route.