Annexe A

Aptitude à conduire — Enjeux et gestion des risques

Message de l’Association canadienne de protection médicale (ACPM) (mis à jour en 2022)* :

La plupart des Canadiens et Canadiennes dépendent de leur véhicule et de leur aptitude à conduire pour se livrer à de nombreuses activités de la vie quotidienne. Il est difficile pour les médecins de dire à leurs patientes et patients qu’il est trop dangereux de conduire en raison de leur état de santé et il est tout aussi difficile pour les personnes concernées d’entendre une telle nouvelle.

Un rapport de médecin entraînant la perte du permis de conduire un véhicule peut susciter de fortes réactions et avoir de sérieuses répercussions personnelles et financières pour les personnes concernées. Les médecins doivent analyser attentivement les divers enjeux associés au signalement (ou non-signalement) d’une personne qui a un problème de santé à une autorité délivrant les permis de conduire. La décision définitive peut avoir des répercussions, dont certaines graves, à la fois sur les médecins et sur les personnes concernées.

Dans la plupart des provinces et territoires, la loi oblige les médecins à signaler toute personne qui, de leur avis, a un problème de santé tel qu’il peut être dangereux pour cette personne de prendre le volant.

Dans quelques provinces ou territoires, les rapports sont discrétionnaires. La décision définitive de restreindre ou non les privilèges de conduire est toujours prise par l’autorité délivrant les permis de conduire de la province ou du territoire, et non par les médecins. Chaque province et territoire prévoit dans la loi une protection contre la responsabilité dans le cadre de poursuites intentées au civil contre celles et ceux qui produisent un rapport de bonne foi. Dans toutes les provinces et tous les territoires, les médecins ne peuvent généralement pas être poursuivis pour violation de la confidentialité si le rapport est produit de bonne foi.

L’ACPM revoit périodiquement ses dossiers lorsqu’il s’agit d’aider des membres dans des affaires qui ont trait à l’aptitude à conduire. Ces analyses ont dégagé trois grands thèmes. Le premier est celui des allégations formulées dans le cadre de poursuites en justice selon lesquelles les médecins n’ont pas déclaré que leur patient ou patiente était inapte à conduire en raison d’un problème de santé. Le deuxième est celui des plaintes provenant de patientes et patients mécontents qu’un rapport ait été transmis à une autorité délivrant les permis de conduire. Le troisième porte sur les plaintes de patientes ou patients au sujet du refus que leur a opposé la ou le médecin d’appuyer leur demande de rétablissement de leurs privilèges de conduire.

*Utilisé avec l’autorisation de l’Association canadienne de protection médicale (ACPM).

 

Omission de signaler une inaptitude à conduire

À la suite d’un accident de la circulation causé par un conducteur ou une conductrice inapte, on pourrait affirmer que les médecins ont omis de conseiller aux personnes concernées de ne pas conduire ou qu’elles ou ils n’ont pas déclaré ces personnes à l’autorité délivrant les permis de conduire, comme elles ou ils devaient le faire. Dans ces cas, la partie lésée peut intenter une poursuite au civil contre le patient (conducteur) ou la patiente (conductrice), la ou le médecin, ou les deux. Il est arrivé que des médecins soient tenus de verser des dommages-intérêts dans de telles circonstances.

Les médecins doivent connaître les critères législatifs et les politiques des organismes de réglementation (collèges) en matière de déclaration de leur province ou territoire et évaluer l’état de la patiente ou du patient à la lumière de ces paramètres.

Il existe d’ailleurs des lignes directrices cliniques pour les aider à effectuer ces examens. Les médecins doivent discuter ouvertement avec leurs patientes et patients de tout problème médical qui pourrait rendre la conduite dangereuse et leur fournir les conseils appropriés. Toutes les évaluations et les examens réalisés, ainsi que les discussions avec les personnes concernées doivent être consignés dans le dossier médical.

 

Plaintes au sujet des rapports

Certaines personnes ne croient pas qu’il aurait fallu transmettre à l’autorité délivrant les permis de conduire un rapport sur leur aptitude à conduire, ce qui n’est pas étonnant. Les personnes ont tendance à être particulièrement troublées si leur médecin ne les a pas prévenues de la production d’un rapport à l’autorité délivrant les permis de conduire. Certaines personnes peuvent contester l’exactitude du diagnostic ou son lien avec la conduite, ou affirmer que le rapport viole la confidentialité.

Afin d’aider à réduire au minimum le risque médico-légal, les médecins devraient parler ouvertement à leurs patientes et patients de tout problème de santé qui pourrait rendre la conduite dangereuse. Les médecins voudront peut-être aussi expliquer la nature et l’objet de tout rapport à l’autorité délivrant les permis de conduire, y compris le fait que c’est l’organisme en cause qui prend toute décision de restreindre les privilèges de conduire. Il faut conseiller aux personnes jugées inaptes à conduire de ne pas le faire tant que l’autorité délivrant les permis de conduire n’a pas fait connaître sa décision. Les médecins doivent toujours documenter dans le dossier médical les discussions qu’elles ou ils ont eues avec les personnes concernées au sujet de leur aptitude à conduire et toute mesure prise (p. ex., rapport à l’autorité délivrant les permis de conduire).

L’ACPM a constaté que dans la grande majorité des cas, les organismes de réglementation de la médecine (collèges) ont appuyé la décision des médecins de produire un rapport.

 

Rétablissement du permis

Dans certains cas, les personnes dont le permis a été suspendu peuvent se plaindre que leur médecin n’a pas appuyé le rétablissement de leur permis. Avant d’aider des personnes concernées à présenter de telles demandes, les médecins doivent évaluer attentivement si l’état clinique de la personne à l’origine du rapport initial a changé considérablement. Les médecins ne doivent appuyer la demande de rétablissement du permis de conduire d’une personne que si elles ou ils se croient capables de formuler des commentaires basés sur les renseignements à leur disposition et sur leur propre savoir-faire. Il peut être utile dans certains cas de consulter des collègues ou d’obtenir une évaluation fonctionnelle.

Les médecins doivent documenter leurs réévaluations cliniques dans le dossier médical et, le cas échéant, documenter et expliquer au patient ou à la patiente pourquoi ils sont incapables d’appuyer sa demande de rétablissement du permis de conduire.

 

Résumé des considérations relatives à la gestion des risques

Les médecins devraient tenir compte des suggestions suivantes qui peuvent les aider à réduire les risques médico-légaux associés au signalement des personnes dont les problèmes de santé ont une incidence sur leur aptitude à conduire.

  • Tenez-vous au fait de la législation pertinente et des politiques de l’organisme de réglementation de la médecine (collège) de votre province ou territoire, et conformez-vous-y.
  • La décision de produire un rapport doit reposer sur les circonstances de chaque cas et sur l’évaluation clinique du risque posé par la personne concernée. Consultez des collègues ou obtenez des évaluations fonctionnelles, le cas échéant.
  • Conformément aux obligations relatives à la confidentialité et à la protection de la vie privée, limitez le rapport à l’information prescrite par la loi et qui est nécessaire pour remplir le rapport.
  • Il est habituellement avantageux de discuter avec la personne concernée de votre décision de produire un rapport, y compris de la justification de celui-ci, de la nature du rapport et de l’obligation de le produire qu’impose la loi. Parlez à la personne de vos constatations et essayez de l’aider à comprendre les motifs liés à la sécurité qui justifient votre rapport.
  • Sans égard à l’obligation de produire un rapport, les médecins doivent conseiller à la personne concernée de ne pas conduire pendant toute incapacité permanente ou temporaire.
  • Documentez vos discussions, vos avertissements et vos conseils à la personne concernée, ainsi que votre décision de produire ou non un rapport sur son aptitude à conduire.
  • Avant de consentir à appuyer une demande de rétablissement du permis de conduire d’une personne, procédez à des réévaluations cliniques attentives et documentez vos constatations et vos recommandations dans le dossier médical. Les médecins ne doivent pas se sentir obligés de fournir de l’information au sujet de laquelle ils ne se sentent pas aptes à formuler des commentaires et devraient s’abstenir de le faire. Consultez des collègues ou obtenez des évaluations fonctionnelles, le cas échéant.

L’ACPM recommande aux médecins de consulter ses publications qui ont trait à la déclaration de l’aptitude à conduire, toutes accessibles sur son site Web (www.cmpa-acpm.ca/fr/) : « Mettre les freins! Quand devez-vous signaler une inaptitude à conduire? », « Les bonnes pratiques – Protection des renseignements personnels et confidentialité » et « Guide médico-légal à l’intention des médecins du Canada » (voir la section 4 du guide de l’ACPM : Législation importante). Les membres de l’ACPM sont également invités à communiquer avec l’Association pour consulter ses médecins-conseils chevronnés au sujet de leur obligation de déclaration.